Lors d'une discution avec un "grand" de la littérature, le sujet de la lecture silencieuse fut abordée.
Croyant encore naïvement que nous abordions tous la lecture de la même manière, je demandais s'il était possible de lire sans entendre sa propre voix mentale qui répétait les phonèmes. Il y eu un silence et cet auteur me répondit en se redressant sur sa chaise que je devais être un bien piètre lecteur pour en être resté à un mode de déchiffrage digne d'un élève de primaire. Rires dans la salle, je ne su quoi répondre.
J'appris par la suite que la lecture et la compréhension des signifiants peuvent varier d'un individu à l'autre, d'une situation à une autre. Je garde ma petite voix pour la poésie ou les notions complexes mais j'ai, difficilement, appris à lire de manière globale et visuelle. C'est vrai que c'est plus rapide. Je peux lire une page de texte en diagonale en quelques secondes ou cristalliser les mots et les sons pour mieux les ressentir. Aujourdhui, c'est devenu un choix pour moi.
Et vous ?
J'aurais du mal à analyser ma façon de lire, mais je sais que je dois m'attarder, m'y reprendre à plusieurs fois si je veux comprendre ce que je lis. Oui, c'est un choix de meilleure compréhension. A côté de ça, je pense que je pourrais être championne en lecture de vitesse mais bon, ça n'a pas tellement d'intérêt.
Si je veux conter correctement une histoire à mon fils, il vaut mieux que je l'aie déjà lue au moins une fois. Et plus je l'aurais contée, plus le résultat sera bon. Mais je crois que je ne suis plus dans le sujet!?
(J'ai besoin d'avis les plus différents possibles, genre grosse dys, pour tenter de créer une grammaire phonétique axée sur des signes manuels. En remontant aussi à l'origine des symboles, il est plus facile de les différencier. Genre pourquoi le p et le b se ressemblent et se confondent autant. Je précise que je ne suis ni professionnel ni expert dans le domaine. Je ne donne et ne demande que des avis.)
@ Gargarine
" Je peux lire une page de texte en diagonale en quelques secondes"
Est-ce que tu veux dire que de cette manière, tu vas pouvoir lire un roman, ou juste des publications scientifiques ou essais ? Est-ce que de cette manière tu saisis la trame, ou bien tu as pu analyser toutes les informations exprimées ?
Ça dépend de ma forme physique et morale du jour, si j'ai bien mangé ou dormi....
Perso la lecture m'a causé de vrais soucis, à l'adolescence, car lorsque le prof demandait à un élève de lire un texte à voix haute, et bien pour moi c'était très impressionnant, car cela donnait beaucoup d'informations intimes sur une personne, si l'on s'intéresse de près à la chose... J'avais l'impression de me mettre à nu, les intonations, le rythme, l'incarnation des humeurs, des situations, le souci de bien se faire comprendre, l'éducation que j'ai reçue, le niveau social de mes parents...
Permettez un autre témoignage : j'ai arrêté de lire depuis quelques années maintenant. Parfois, la couverture d'un libre m'accroche, ou un thème, un auteur ; j'ouvre le livre, et je ne vois qu'une ligne ininterrompue de signes noirs sur fond blanc. Je suis devenu hermétique à ce média de transmission : j'ai besoin d'images, de ressenti, d'expérience, pour apprendre ce que je veux apprendre maintenant, à ce moment précis de ma vie.
Du coup, les mots, les lettres, les signes et symboles, m'impressionnent encore davantage : en prenant mes distance d'eux, je constate leur puissance, leur omniprésence dans nos vies.
Mais j'ai passé quinze ans d'amour fusionnel et obsessif avec le langage, et la lecture, et durant cette période, je ne pouvais abandonner un livre, même les plus chiants je les finissais, et aussi dans mon mode de relation au texte, je prenais le temps de lire chaque mot, je m'arrêtais souvent sur une idée, ou simplement une tournure, une association de mots inédite. Je ne voulais rien rater de chaque page. C'est cette sensation, de lire un livre, et de se forcer à ne pas en lire plus de 3 ou 4 pages par jour, car chaque page est si puissante, chaque phrase même... Presque trop bon pour être consommé en excès ! Le saffran littéraire...
Donc, il t'es possible de lire en diagonale, en quelques secondes, une page entière, dans le détail ?
Une rapidité augmentée en somme. Je ne connais pas cette sensation.
Ou si : pour la vaisselle. Là, j'arrive à enchaîner les mouvements si rapidement, je 'scanne" presque chaque objet, je le lave à peine on dirait, et pourtant, à la sortie il est propre. :)))
Pour la lecture à haute voix, du genre petite histoire du soir, mes yeux lisent quelques mots avant de les prononcer. Ce qui permet une comprehension préliminaire et d'adapter le ton, le rythme, l'émotion...
@ Gargarine
Oui je vois, arriver à saisir le contexte, en même temps qu'on prononce le mot. Ça me parle.
Comme pour toi Julien, il m'est de plus en plus rébarbatif de lire. Comme tu dis, des rangées de signes noirs sur du blanc...
Et, il faut que les premières lignes soient costaud pour que j'aie envie de continuer. Sauf pour les livres documentaires bien sûr
@ LibertEchErie
Oui, et aussi, je relativise la diversité des outils à notre disposition pour rentrer en contact avec notre environnement, et mon ressenti tout personnel c'est que les mots ont pris une importance TOTALE dans nos manières de communiquer, ils sont partout, tout le temps, sous toutes les formes possibles, et même quand on n'en "consomme" aucun, ils sont dans nos têtes, un flot ininterrompu de mots, de voix, d'idées...
Ils sont magiques, fascinants, mais à un moment j'ai ressenti le besoin de contrôler le débit du flot de mots qui rentrent dans ma conscience, j'ai considérablement réduit mon "input" de langage, d'ailleurs, j'en parlais ce matin avec Gwenouille : même musicalement, je n'écoute plus que des instrumentales, plus de voix humaine ni de mots... Juste des sons... Sinon je "replonge" dans l'hyper-analyse...
Certaines personnes préfèrent des chansons étrangères pour rester dans l'émotion.
Oui, fatiguée de l'hyper-analyse moi aussi. Mais il me faudrait un autre environnement pour passer en mode silence croissant. Ici et maintenant, je n'y arrive pas à mon aise
@Gargarine "cristalliser les mots et les sons pour mieux les ressentir" ça ça me parle.
Par contre "Je peux lire une page de texte en diagonale en quelques secondes" ça ne me parle pas. Sauf cas exceptionnels comme si je connaissais déjà le texte et que je le survol comme pour m'en souvenir. Mais sinon je ne sais pas faire. Sinon je ne peux pas étudier la profondeur de ce que je lis.
De toute façon, la plupart du temps, un peu comme Julien et LibertEchErie, je n'aime pas lire. Faut vraiment que je sois inspirée voire passionnée par le sujet.
Je pense qu'il doit me rester des mémoires post-traumatiques du collège où les profs de français nous obligeaient à lire un livre bien précis et franchement pas des plus inspirants me concernant. La plupart du temps, je me tapait un zéro car je n'arrivais pas à entrer dans le livre. Je lisais bien des mots mais mon esprit lui, il était ailleurs, totalement. Je me suis vu lire plusieurs pages sans rien comprendre car pas interessée.
Je sais pas si ça répond à ta demande mais c'est à peu près tout ce que je peux dire à ce sujet.
Ah, le programme scolaire ! Je me demande combien de lecteurs potentiels il a réussi à décourager. J'ai toujours détesté qu'on m'impose des lectures, donc je n'ai jamais lu les bouquins que d'autres pensaient nécessaires à mon éducation pendant les cours de français. Je me souviens d'un prof qui nous avait prescrit "l'enfant" de Jules Vallès. A la place, j'avais lu "l'insurgé" du même auteur, beaucoup plus intéressant de mon point de vue.
J'étais pourtant un grand lecteur. J'ai beaucoup ralenti ces dernières années à cause de la place importante qu'a pris le numérique dans ma vie professionnelle et personnelle : je lis beaucoup de textes en ligne et plus vraiment sur papier, donc exit tous les romans que je dévorais. Jusqu'à mon entrée dans la "vie active" (comme on dit ;) ) je lisais au moins un livre par jour.
Je ne m'étais jamais demandé comment je lisais, pour moi c'est tellement naturel. Je plonge dans le livre. Les mots, ça devient des images, des sensations, des informations (selon le type de livre). Je ne m'arrête sur une phrase que très rarement, soit pour la comprendre soit pour en apprécier la musicalité. Le fait que je fonctionne en bilingue au quotidien (français/anglais) change un peu ma perspective je crois. Quand j'ai besoin de traduire, ça m'impose de passer d'une langue à l'autre mais sinon, ça suit le même chemin : phrases=sens, sens=information, ou tout au moins des données sensorielles. La nature des mots dans les phrases, leurs nuances, c'est un peu comme des notes de musiques qui composent un morceau. Elles sont importantes, je m'arrête parfois sur une séquence ou sur une note en particulier, mais c'est la mélodie et les harmoniques qui s'en dégagent qui vont me faire vibrer (ou pas) :)
Je crois que la manière dont mon esprit fonctionne en rapport avec l'écrit, c'est une autre déclinaison de l'expression orale, un autre support mais la même base de contenu.
Pas sûr d'arriver à bien exprimer tout ça; c'est une tentative d'analyse à chaud là ;)
@Julien : de la lecture plaisir surtout. Des romans. Des mondes dans lesquels je pouvais m'immerger.
que l'on lise vite ou pas, en diagonale, difficilement ou en quantité, lisons nous avec les filtres de notre perception ou dans l'accueil de la chose, avec un regard neuf ?
Je trouve que c'est ça le plus important et le plus inhabituel
Pareil de que Merlin.
J'ai aussi cependant cet immense défaut désormais d'être si bien assis dans les empires de la rhétorique et de l'analyse lexicale, sémantique, philosophique, et bla et bla et bla que j'achoppe toujours terriblement sur les textes mal écrits, rabougris, aux musiques aléatoires et aux cacophonies patentes. J'apprécie relire ou "réécouter" les phrases parfaites, et j'aime bien aussi parfois reprendre certains textes ou poèmes bien connus en imaginant des variations.
Incroyable d'ailleurs la quantité de piètres auteurs qu'on peut trouver... m'enfin.
Contrairement à beaucoup, je n'ai jamais réussi à m'imposer une lecture jusqu'au bout. Au collège, souffrant d'une sensation terrible de perte de temps (en anglais, ce serait vraiment "excruciating pain" qui me viendrait en tête... c'est dire) en lisant "La fée Carabine" de Pennac, j'avais décidé de faire du vélo d'appartement en même temps.
C'est dire.
Je me souviens que "L'Homme sans Qualités" de Robert Musil, et "Une Histoire d'Amour et de Ténèbres" de Amos Oz, ont été les deux livres que j'ai lus comme on mange du caviar, phrase après phrase, en posant régulièrement le livre sur la table...
... et aujourd'hui j'ouvre ces mêmes livres, je lis quelques phrases au hasard, et j'me dis mais quel ennui ! Comment ai-je pu AIMER ceci, car oui, j'ai été amoureux de la Lecture et du Livre... Mais en ce moment nous vivons sur des planètes différentes !
Du coup j'envie un peu cette "capacité" à pouvoir extraire l'essence d'une page entière, en quelques secondes seulement... Ça me serait bien pratique en ce moment :))
Entraîne toi, on a tous les même connections neuronales. Le cerveau est le seul muscle qui s'use que si l'on ne s'en sert pas.
@ Gargarine
Et du coup, est-ce hors sujet de te demander ton top 3 de tous les livres que tu as lu, toutes catégories confondues ? Si tu penses que cela a un quelconque intérêt...
c'est trop me demander oui :)
Je lis un peu ce qui me passe sous la main depuis que je suis gosse. Tout peu avoir un intérêt. Genre pour élargir le bouzin, lire, ce n'est pas forcement dans des livres. C'est temps ci je lis beaucoup d'architecture, archéologie, cathédrales, cartes Ign....et un max sur internet car les archives sont généralement longues à exploiter. Certain disent même qu'ils lisent dans les lignes de la main, dans les étoiles, dans les fleurs.... (je te taquine à peine)
D'acc. Merci des précisions. Allez une dernière question curieuse : y a-t-il un alphabet, ou plus largement un ensemble de signes défini, qui attire particulièrement ton attention, ou te procure davantage de plaisir, ou autre sensation ? Qui te stimule davantage que les autres ?
Peut-être même un top 3 ?
looool
@Gargarine : Le mieux est de réussir ses études sans passer ses examens. 😵
J'ai eu des problèmes à lire depuis l'enfance. Heureusement à l'université mon état c'est amélioré je crois pour le fait que j'ai été plus libre de choisir: sujet, temps et lieu de lecture. Avec l'entrée dans le monde de travail une chute sévère. Tant que je me suis dirigée vers des métiers où il ne fallait pas trop lire.
Je crois que l'humeur et l'état de santé y font beaucoup.
- je cherche de réduire au max le temps de lecture donc j'arrive à lire en diagonale pratiquement toujours. J'ai développé une bonne synthèse et à partir de mes lectures en diagonal j'arrive à retenir des mots sur lesquels je m'appuie pour disserter, réfléchir ou pour faire des schémas.
- il y a quelque années une prof d'allemand a évoqué une dyslexie dans mon cas. J'ai réfléchi et effectivement mon cerveau naturellement fait un tri des mots (plus ou moins abordables).
-dernièrement j'ai pris du plaisir pour certains poèmes, par contre j'imagine la voix du personnage du poème pas la mienne. je pense que j'utilise la lecture pour me sentir moins seule dans ce cas. Le petit comte aussi j'aime et je lis avec le même procédé que pour les poèmes.
Le petit comte ? Le petit compte ? Le petit con te ? Le petit conte ? Ou un autre peut être.
Encore un très bon petit moment passé avec Alexandre Astier 😍
Je ne suis pas sûre de ma réponse et de ma compréhension du post initiale...
Mais tel que je l'ai compris. La réaction du "grand" de la littérature, exprime seulement la subjectivité de la lecture, du lecteur, non ?! (et ta compréhension trop formelle de la chose -j'y reviendrai)
C'est un peu comme une scène de crime. Demander à chacun des témoins ce qu'il aura vu. Chacun aura finalement sa propre version des choses. Sa propre perception. L'un aura vu que c'était un grand homme. Un autre aura vu qu'il était plutôt habillé d'un certaine manière. Un autre qu'il était plutôt habillé comme cela...
Ce que je veux dire, c'est que pour n'importe quelle lecture, chacun retiendra tel ou tel détail, un relief particulier, un mot qui lui parle spécialement...
A travers la réaction du "grand" de la littérature envers toi, Gargarine, peut-être exprimait-il la lecture trop formelle et restrictive de "lire sans entendre sa propre voix mentale qui répétait les phonèmes" ?!
Suis-je assez clair ?
Un grand de la littérature ? Il aurait dû avancer humblement tout d'abord, au lieu de "pondre" cette réponse, une bien piètre réponse, me semble-t-il, dont s'exhale, un peu trop à mon goût, un académisme grégaire, laborieux et trop simple (?) pour que l'on puisse qualifier cette personne de "grand". Bon ms mon regard est biaisé. J'ai du mal à admettre comment certains espaces sociaux sont des fabriques à ego ou ce dernier semble se noyer confortablement ... dans une sorte de paresseuse volupté (mon fort penchant pour l'égalité biaise ma réponse) ... Merci pour ces témoignages sur votre rapport à l'écriture, ceci est très éloquent et j'admets que face à une telle question, @Gargarine, sans y connaître gdchose ds le fond en linguistique et littérature, je pense que ta question me semble une question pertinente pour commencer une thèse, un fil de réflexion. Ceci me fait penser au fait qu'à l'idée,au départ, enfin je veux dire au moyen âge , la lecture était loin d'avoir la même nature qu'elle a aujourd'hui. Je ne sais plus ce que vaut ma source, ms cette dernière disait qu'à l'époque de la scolastique par exemple la lecture silencieuse était proscrite, ou inconcevable. Enfin ce n'était pas comme ça qu'on lisait... On récitait à haute voix...
@abstractio L'utilisation du terme "grand" était pour moi ironique. Enfin, pour moi.
Je vais me renseigner sur les principes de la lecture scolastique, merci :)
@Siryack *la lecture trop formelle et restrictive de "lire sans entendre sa propre voix mentale qui répétait les phonèmes" et " ta compréhension trop formelle de la chose -j'y reviendrai)"* Je n'ai pas vraiment compris désolé.
@sophia. Ah d'accord. Je l'avais pris un peu au pied de la lettre, ce "grand"... ça m'a plu, aussi probablement de saisir cette possibilité pour critiquer.. Oui, la scolastique, effectivement, c'était à l'époque un autre rapport à la lecture... Il est intéressant effectivement de se pencher sur ce glissement des pratiques, de cet usage de la lecture, jusqu'à la rupture que représente l'invention de l'imprimerie (la réforme), menant à l'alphabétisation puis à la massification de l'enseignement supérieur au XXe siècle, d'abord aux Etats-Unis, puis ailleurs ensuite, et qui atteint statistiquement aujourd'hui un palier en termes de nombres d'accédants et donc de mobilité sociale, ou de perspectives d'ascension sociales... Mais ceci est un autre sujet. Enfin, n'hésite pas à m'en donner des nouvelles, de ces pratiques de la lecture dans la scolastique... ça doit être documenté
Ben pareil, je n'avais pas saisi l'ironie de "grand" de la littérature... Oups ! Désolé. :-/ Du coup ça fausse tout ce que je croyais avoir compris et l'explication qui s'en suit ! Euh... on oublie tout ce j'ai dit hein ! 😄 😶
la journaliste Uzay Bulut 😘
https://www.imprescriptible.fr/proces/Uzay-Bulut.htm
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