Vous avez dit... atypique ?

Atypique, si ce n'était que ça, encore...

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Atypique, si ce n'était que ça, encore...
Gloubiboulgale 08 mai 2024 à 01:21

Bonjour,

Je trouve que c'est la solitude, l'incomphréhension, qui jalonnent la vie de quelqu'un de "différent". Surtout si cette "différence" est difficile à cerner. Les gens ne comprennent pas. Donc, rejettent. Se tiennent à l'écart.

A tort ou à raison, je crois cumuler plusieurs handicaps sociaux et psychologiques. Beaucoup de gens vous diront que nous avons en nous une richesse, qu'il faut la cultiver, etc. Tout dépend. C'est une question de point de vue. Moi je crois que beaucoup de ces spécificités sont des cadeaux empoisonnés. Tout dépend certes de ce qu'on en fait. Mais on en fait ce qu'on peut, au sein d'un système qui, lui, a d'autres valeurs. Pour un dont on vous parle, qui à réussi à monnayer sa différence, en tirer parti, qui s'est taillé un nom grâce à elle, peintre, écrivain ou autres, combien de centaines, de milliers, qui en ont souffert tant et plus ? Qui n'en ont eu que les inconvénients ? Que ça a rendu dingues ?





C'est A FORCE qu'on me rejette que j'ai fini par me dire que je devais être différent. Et puis des fois, on me l'a dit aussi, plus tard. Car c'est un phénomène qui s'accentue : le rejet entraîne l'isolement, et dans l'isolement, forcément, on perd de vue les lieux communs, les repères, les évidences. On peut diverger peu à peu, insensiblement, sans en avoir spécialement l'intention. On s'enfonce dans son univers intérieur et il peut dériver, peu à peu, oh, pas beaucoup, mais dans notre monde si normatif, il n'en faut pas plus. Beaucoup n'attendent qu'un prétexte pour rejeter, juger, ostraciser. Parfois même, s'en passent. A la tête du client. On l'a tous connu. Moi, gamin, je me souviens que d'autres me harcelaient, sans raison. Ils étaient plusieurs, j'étais seul, allez savoir. L'un d'entre eux ne pouvait pas me voir, et ça suffisait pour qu'il entraine les autres.



Seul, on se tourne plus vers son monde intérieur. Il peut en sortir, à terme, indirectement, une forme de richesse, oui. Disons, dans certains cas, une créativité. Mais si elle n'est pas reconnue, elle se retournera contre celui qui la possède.



Premier handicap, je suis hyper sensible. Quelqu'un comme ça est une proie rêvée pour les pervers, qui ont vite repéré qu'ils pouvaient nous faire mal. On se retrouve souvent victime de harcèlement, de rejet, d'incompréhension. En plus, si on est un homme, ça la fout mal. On est censé être "fort", etc. Les vieux clichés ? Oui mais ils fonctionnent. En tous cas, on les subit, on en subit les conséquences. Et donc ? Rejet, tout simplement, sauf pour qui fait l'effort d'aller au-delà. Dans la plupart des cas, sauf exceptions rares, rejet.


Deuxième handicap, je crois que je suis atypique. On m'a toujours traité comme tel. Disons que dans des situations convenues, où on attend une réponse précise, je suis souvent ailleurs que là où on m'attend. Déjà, il existe un décalage certain entre ce que je pense et la façon dont je m'exprime. Je pense que ça, c'est dû à un manque de confiance en soi. On n'ose pas vraiment être soi, on bafouille au lieu de dire les choses clairement, on a des gestes maladroits, dans lesquels on ne se reconnait pas, etc. L'atypique est rejeté, sauf cas très rares, sauf s'il tombe sur quelqu'un qui le comprenne vraiment, qui lui ressemble un peu, etc. Et celui qui manque de confiance en lui, qui ne donne pas les réponses stéréotypées dans tel cas précis, qui hésite... On n'a pas envie de le fréquenter. On le trouve étrange, décalé.

Un peu plus de rejet, donc.



Troisième handicap, je pense être zèbre, hp, etc. On me l'a souvent dit. Je ne me suis jamais fait tester : ça coûte cher, et je ne vois pas à quoi ça m'aurait avancé. Il semble que mon fonctionnement ne soit pas standard, je surprends, et donc : encore un peu plus de rejet.



Quatrième handicap, et là j'en suis sûr : je suis un créateur. Toute ma vie j'ai eu un rapport particulier à mon environnement, à en prendre des éléments pour les faire fonctionner autrement. Des idées, des mots : écrire. Formes, lumières, couleurs, volumes : créer en arts plastiques. Sons, rythmes, harmonies : composition musicale. C'est comme ça. Mon rapport au monde est de toujours imaginer ce qu'on pourrait faire avec ceci ou cela, en le détournant.

Or, un créateur, ça dérange. On ne comprend pas. Il y a de la jalousie. On ne respecte que s'il a réussi socialement, s'il est reconnu. Parce que là, on ne peut pas trop critiquer, on passerait pour un plouc. Mais s'il n'a pas réussi on peut y aller, et beaucoup d'individus ne ratent pas l'occasion. On s'est toujours foutu de moi, on m'a toujours considéré comme un bizarre. Même dans ma propre famille. Rejet, rejet.



Pour compliquer les choses, à l'usage, je me suis rendu compte que j'étais bipolaire. Comme si ça n'était pas assez embrouillé et difficile à gérer.



Alors voilà. S'il n'y avait que le côté atypique, ce serait moindre mal.



Toute ma vie s'est déroulée selon une courbe allant crescendo. Rejeté à droite à gauche, de plus en plus seul.

En plus, il se trouve que j'ai des passions. Surtout concernant la musique. Et sur ce sujet, j'ai des idées bien précises. Disons, un certain niveau d'exigence. Et ça, tout le monde ne le comprend pas toujours.



Je suis très droit dans mes relations avec les autres, très entier. On dit que les hp ne supportent pas l'injustice. C'est le cas, me concernant. Je suis très sensible, et si quelque chose me choque, me parait injuste, je me renferme, je perds confiance.

J'ai très peu d'amis. Et je les vois peu souvent.



Heureusement, depuis quelque temps, j'ai un projet d'album, avec un ingénieur du son. Mais il est très pris, il fait ça en plus de son travail, il est expert en informatique. Donc, c'est un peu en pointillés. Et même quand l'album sortira, je serais étonné que ça ait des conséquences vraiment concrètes sur ma vie. Au quotidien, je ne vois quasiment personne. Je suis seul chez moi, et je travaille sur la musique. J'aimerais jouer avec des gens, mais mon niveau est modeste, je manque de confiance en moi. Et puis, dans ma région, il n'y a que variétés, chanson et pop rock, qui marchent. Et je ne supporte pas ça. Je propose souvent des projets autres, mais on me répond invariablement à côté. Il m'est arrivé d'entrer en contact avec quelques individus ayant des idées rejoignant les miennes, mais ils se trouvaient géographiquement très loin, on n'était pas plus avancés.

Peu à peu, j'ai le sentiment que l'empan des possibles se rétrécit. Quand j'étais jeune, je pensais que tout était possible, je voyais la vie comme une aventure stimulante. Je m'imaginais que j'allais accomplir de grandes choses. J'ai fait des trucs un peu spéciaux, dans mon coin, un peu différents. Mais plus je mettais la barre haut, plus j'étais exigent, et plus les gens, autour, trouvaient ça bizarre. Il aurait fallu, pour que ça plaise, que je me conforme à l'air du temps, à ce qui était à la mode, à la pensée dominante.

A mesure, on se retrouve malgré soi dans le rôle du farfelu de service, du bizarre. Puis, peu à peu, dans celui du VIEUX farfelu, c'est encore pire.



J'ai traversé des épreuves assez terribles. A tel point que je ne veux pas en parler. Disons simplement que c'est allé crescendo, le rejet, les situations tordues, etc. C'est allé beaucoup, beaucoup trop loin. Vraiment dur.



A présent, je peine à trouver du sens à tout ça. Oui, c'est bien joli, le côté atypique, original, ça fait bien quand Hollywood nous brosse le portrait flatteur de tel ou tel individu reconnu, tel grand penseur, tel scientifique, tel créateur ayant réussi à se faire une place, à faire ACCEPTER sa différence. Et je ne parle pas la de gloire et célébrité, non. Juste : RESPECT. Disons, se sentir LEGITIME. Ne pas systématiquement être pris et traité en baltringue, paumé, excentrique à moitié cinglé. Mais en dehors des films, des romans, qui enjolivent, qui poétisent et qui romantisent, la réalité est bien plus prosaïque : on est seul. Et on passe pour un allumé. Un jour, quelqu'un m'a dit une phrase qui m'a surpris, que j'ai compris bien plus tard : "il ne faut pas défier l'ordinaire". C'est sans doute ce que je faisais. De part ma simple existence, je défiais l'ordinaire. Me reviennent en tête des mots de Brassens, musicalement ça n'est pas mon truc du tout, mais les paroles ont une portée, dans ce cas précis :

"Mais les brav'gens n'aiment pas que,

L'on suive une autre route qu'eux".


Là, je me sens mal. Et je me demande qui, parmi vous, le sent à ce point, en souffre vraiment. Je ne demande ni qu'on me réconforte, ni qu'on me fasse la leçon, ou qu'on essaie de me détromper : vous ne savez pas ce que j'ai traversé, et personne n'est à la place de personne. Juste voilà. Je veux dire que tout ça mène à une voie étroite : la SOLITUDE. On est incompris, on se retrouve seul dans son coin. Pas plus. J'ai besoin de le dire car ça déborde, ce soir. J'ai du chagrin. Excusez le dérangement, si vous trouvez que c'est importun. Ce n'est pas le but, mais vraiment, là, je me sens perdu.



Et vous, où en êtes-vous ? Avez-vous réussi à négocier votre insertion sociale, à vous trouver une place malgré, ou grâce à votre côté, vos facettes, atypiques ? Comment vous êtes-vous débrouillés, avec ça ?

Rothle 08 mai 2024 à 03:07  •   114167

bonsoir @Gloubiboulga ,
je ne vais pas réagir en long et en large à ton message maintenant, parce que ça n'est pas possible.
Néanmoins je voulais au moins témoigner du fait que tu es lu, écouté, entendu.
Même si ça ne change pas fondamentalement ce que tu exprimes et ressens ici, c'est quand même sans doute bon qu'au moins ton propos lui-même ne reste pas dans la solitude.
Et qu'éventuellement tu y trouves une forme de réconfort, ou d'apaisement.
Parce que tu sembles visiblement être dans une grande souffrance.

Un premier point évident, et ce qui que l'on soit: on est tous différents, quels que soient les critères observés, à des niveaux plus ou moins marqués, de l'Autre.
Et à ce titre on expérimente tous d'une façon ou d'une autre la solitude.
Ce qui est sans doute important, est d'appréhender la notion de distance:
distance que tu as dans tes différences par rapport à l'autre, aux autres. Distance aussi par rapport à la représentation de celui que tu es, et de celui que tu imaginais, ou de celui que tu voudrais être.
C'est assez difficile comme ça pour faire une forme de paix avec cette distance, en tout cas y mettre, justement, une forme de distance.
Il faut essayer de composer avec cette distance, l'intégrer comme un fait partagé par tous.

Un second point est qu'au-delà du message que tu postes ici, et des échanges que tu cultives, il faudrait sans doute songer à trouver un espace, sinon bienveillant, au moins neutre, pour t'exprimer.
Je veux dire par là un échange qui se fasse dans un cadre où tu peux t'exprimer, te libérer des ces éléments que tu évoques et semble pas mal ressasser en boucle.
Il y a toujours moyen de trouver un espace, qui ne soit pas onéreux voire gratuits (les CMPs je crois), même si l'accès peut ne pas être immédiat du fait de listes d'attente.
Ça me semble important quand même que tu essayes de trouver un espace de parole, que ce soit auprès d'un professionnel de santé ou de l'accompagnement, ou de toute autre personne auprès de laquelle tu peux t'exprimer sans sentir encore plus ce sentiment de décalage, différence, solitude.

Pour finir, je citerai ce qui est indiqué (dans le film "Primaire") comme étant le début de David Copperfield.
C'est visiblement pas le cas, je ne sais même pas si ça figure dans le bouquin.
"Deviendrai-je le héros de ma propre vie, ou cette place sera-t-elle occupée par quelqu'un d'autre?"
Par le plus grand des hasards, à moins qu'il y ait une sorte de fil d'Ariane dans le déroulement d'au moins une partie (fût-elle infime) de nos (au moins la mienne en l'occurrence) existences, je me suis retrouvé, et alors que c'est pas du tout dans mes interrogations actuelles, sur une série de films depuis le début du week-end, qui alors qu'ils sont de toutes origines et de sujet a priori bien différents, confronté à une forme de thématique globale, qui traite précisément de cette distance que j'évoque plus haut et de qui l'on est (par rapport à soi, aux autres, au soi passé, au soi futur etc.). Et qui se retrouve dans la citation ou pseudo citation plus haut.
ça vient quelque part aussi se télescoper avec ton message. Et il y a eu une telle succession d'éléments proches dans ces différents films, sans que j'y aie pourtant été spécialement attentif initialement, que j'ai fini par me demander s'il y avait un quelconque sens à ça, si je devais évaluer ou réévaluer ce regard, cette distance, si ça arrivait totalement par hasard ou pour souligner quelque chose en particulier.
Je n'ai pas pu m'empêcher de sourire en y pensant et en lisant ton message, parce que je suis assez curieux des noeuds au cerveau que cette série de réflexions et coïncidences (ou pas; je n'ai pas la réponse, mais en soi c'est déjà assez troublant) auraient pu générer dans ton esprit, alors que tu sembles en pleine interrogation.
De l'apaisement et /ou du relativisme, ou au contraire encore un peu plus de noeuds au cerveau.
Bon courage à toi.

paradoxle 08 mai 2024 à 12:34  •   114189

Salut, salut !
je commencerai comme @Roth, tu es lu et écouté ici, tu as bien fait de te livrer.

Et je vais surtout parler de musique.
À la question sur l'insertion sociale, moi j'ai choisi de fuir la société, m'inserer à 20 ans était juste destructeur pour moi, un truc à péter les plomb, j'étais pas loin de craquer totalement. Alors j'ai fui.

Et j'ai fait de la musique dans les milieux alterno-underground. Avec des cinglés. Où nos musiques étaient un patchwork de nos créativités atypiques. Pas de recherche de succès, de gloire ou quoi, rien à foutre. Mais une certaine reconnaissance, en vase clos certes, mais de qualité.
Et où c'est justement nos différences bizarres qui étaient recherchées, appréciées. Avec toutes les difficultés humaines que cela peut engendrer mais que nous apprenions à dépasser, à apprivoiser.

N'y a-t-il pas des cercles de musique expérimentale dans ton coin, des lieux de concert chelou, des assos de cinglés, aussi bien artistiquement que dans leur fonctionnement ?
J'avoue que je connais pas le sud-est mais ça doit bien exister, il y a en a partout me semble-t-il.

Je ne connais pas les "milieux de la musique", enfin... le peu que je connais je trouve ça insupportable, bande de prétencieux, ambitieux, prêt à toutes les compromissions et autres saloperies pour "percer". Berk !


Pour ce qui est de la distance, le pire que j'ai fait, c'est un groupe où j'étais à Bruxelles, l'un en Bretagne, l'une à Toulouse, l'un à Strasbourg et l'autre à Bourges. On a fait deux albums et quatre tournées en trois ans. On se donnait rendez-vous, on arrivait avec nos idées, on composait ensemble avec ça, on répétait 10 jours, 15 jours, 6 à 8 heures par jour, et on partait pour un enregistrement ou une tournée directement après, hop-là !

Faut évidemment avoir du temps, une résidence plus une tournée, faut prévoir un mois, un mois et demi où on fait que ça, la tête dans le guidon. Pas que la musique d'ailleurs, en bon punk-alterno, on faisait tout, la production (avec l'aide de labels underground), la pochette, la préparation de la tournée, la mécanique de la camionette, etc.
On gagnait pas de sous. Les sous, c'est pour le groupe, pour les frais en tout genre, on jouait dans des concerts à prix libre et ça roulait. Des milliers de groupes fonctionnent comme ça, de plus en plus. Des précaires, rmistes ou p'tits boulots.
Quand je dis punk-alterno, ce n'est pas un style musical, j'ai fait de la new-wave avec un chanteur liturgique libanais, de la chanson française électro-expé, de la kraut-noise, du punk bizarre où je jouais de la clarinette, etc.

Là, je suis à Lille, je ne trouve personne pour jouer. Mais un pote de Toulouse vient de passer dans le coin et on a prévu de faire un truc ensemble. Il écrit des super textes, il slame/chante. Et il a pensé à un batteur en Provence car il est sûr qu'humainement ça va le faire (un taiseux tout gentil) et il a une formation jazz, une bestiasse apparemment. On se voit à priori cet été pour voir si ça colle. Sans doute où j'habitais avant en Belgique, répéter dans l'étable qu'on avait transformé en salle de concert.


Bref, tout ça pour dire qu'il existe des chemins de traverse, des possibilités à inventer. Parce que j'ai entendu ta démo, c'est vraiment excellent, j'ai du mal à comprendre que tu sois aussi rejeté. Je me dis que tu n'es pas forcément tomber sur les bonnes gens... chais pas. (j'avais envie d'écrire : "C' que les gens peuvent être cons, quand même ! 😀)

Après, tu parles d'exigence, c'est aussi mon cas. Mais il faut aussi parfois mettre de l'eau dans son vin et composer (dans les deux sens du terme, du coup) avec les autres. Ça donne pas forcément ce qu'on avait en tête mais ça apporte de la richesse, de la nouveauté.

Il y a évidemment la question de l'âge. Mais le lieu de musique expérimentale ici à Lille, ils ont tous maintenant entre 50 et 60, facile. Et ils continuent à créer, à faire plein de groupes ou des solos, invitent des gens de partout dans le monde. Et ils sont tous sacrément particuliers dans leur tête, c'est le moins qu'on puisse dire.


"Je ne demande ni qu'on me réconforte, ni qu'on me fasse la leçon, ou qu'on essaie de me détromper".
Du coup, j'ai juste tenté de te montrer qu'il existe d'autres voies.


Je disais que je connaissais pas bien le sud-est mais il y a l'Embobineuse à Marseille. Au kazou !

Gloubiboulgale 08 mai 2024 à 16:55  •   114202

Merci à vous,

Je ne sais pas comment répondre à chacun, ni comment on est censé citer, alors en mode mieux que rien, je réponds comme ça, tant pis.

Tout d'abord, je dirai que la distance, il n'y a plus tellement la possiblité d'en avoir. Quand je dis que les choses ont allées trop loin, c'est un euphémisme. Je parle de traumatismes assez graves. On n'a plus la distance, quand c'est comme ça.

C'est que tout au lon de ma vie, j'ai rebondi de rejet en rejet. Et ça a commencé très tôt. Et c'est allé crescendo, à un point que personne parmi vous n'imagine, je présume.



Donc, terminé la distance. A un moment, ça devient trop. C'est un peu comme si un dentiste maladroit trifouillait dans la mâchoire grande ouverte, perdait du temps, faisait n'importe quoi : au bout d'un moment, on a un réflexe, on lui vomit dessus. On ne supporte plus rien, on est à vif, c'est une réaction incontrôlée.

On en est là.

Je crois que je vais répondre par petits bouts, car c'est en train de faire n'importe quoi, là.

J'ai vu des psys. Ils sont impuissants. Quand j'ai raconté mon histoire, je les ai vu se ratatiner, se dégonfler. Vraiment. La sale tronche du type qui se dit : "lui, je ne vais pas pouvoir l'aider. Et il va revenir, tant et plus, dans mon cabinet, et je ne pourrai rien faire pour lui". Alors ils ont eu le réflexe habituel : les vilaines molécules, celles qui vous fusillent les neurones. J'en ai pris. Cela m'a bien esquinté. Et puis un jour, j'ai décidé de tout virer. Je me suis fait mon petit protocole dégressif et petit à petit, j'ai tout jeté à la poubelle.

Le dernier que j'ai vu était un salaud à qui j'avais pourtant dit que j'étais très précaire, économiquement. Pension d'invalidité, etc. Il m'a quand même réclamé des dépassements d'honoraires, le fumier. Une fois 80€ et comme je m'en étonnais, la fois d'après, 120 ! Je n'y suis plus jamais retourné. Tiroir-caisse à la place du coeur.

L'idéal, pour les traumatismes, c'est censé être l'EMDR. Mais les gens qui font ça, dans ma région, ne sont pas remboursés, c'est donc hors d'atteinte, pour moi. Les CMP ? J'ai été voir un type qui m'a adressé à un centre comme ça. On m'a répondu au bout d'un moment qu'on ne pouvait pas me prendre, que je ne dépendais pas directement du grand patelin où ils se trouvent. Ils me font marrer : chez moi il n'y a rien, je vais où ?

Réponse : nulle part, m'sieur. On s'en fout, ça n'est pas notre problème.



Bon, je poste ça, je verrai après.

Gloubiboulgale 08 mai 2024 à 17:33  •   114204

Je continue, comme je peux...

Dans mon secteur, non, il n'y a pas de gens qui fassent autre chose que pop rock et variétés.

Ou alors, si : il y en a, mais ils sont pris dans leurs propres projets. Ou ne me prennent pas au sérieux.

C'est compliqué. Comment dire ?

J'ai observé la façon dont ça se passe, et j'en viens à formuler ça de la façon suivante :

Tout se passe comme s'il y avait deux camps, bien distincts : d'un côté, les petits amateurs, tous styles confondus. De l'autre, les personnes exigeantes, qu'on trouve, elles, dans jazz et classique. Et éventuellement, genres dérivés qui peuvent éventuellement, comporter de la fusion, du prog', etc. Admettons. Et encore, pas des masses. Souvent, jazzeux intégristes jazz.

D'un côté, on a des gens ayant des niveaux divers, du débutant qui joue dans le groupe "parce que c'est un bon pote" à celui qui gratte à toute vitesse - même si c'est pour jouer des clichés, ce qui est souvent le cas, du moins chez les gratteux. Quel que soit le niveau technique, là on a une population syncrétique, je dirais. On a vraiment l'impression que pour ces gens, tout se vaut. J'ai une formule pour ça, à la Jean Yanne : "tout il est très beau, tout il est très joli". En gros, que tu reprennes du Claude François ou que du fasses du heavy metal, tout se vaut, tout est pareil, tout est "cool". On dirait vraiment qu'ils n'ont aucun discernement, que du moment qu'ils jouent, ils sont contents. Comme si tout se valait, comme si, au fond, peu importait ce qu'on joue, "du moment qu'on s'éclate".

Je comprends. Ce sont sans doute des gens qui ont appris à jouer, qui ont un savoir-faire et veulent s'en servir. Pour s'amuser, pour briller, pour "réussir à tout prix", enfin, il y a toutes sortes de motivations possibles. J'ai même connu un type qui est devenu batteur parce qu'il pensait qu'avec ça, il aurait du succès auprès des filles !

Cette population a, en gros, les mêmes goûts et aspirations que le public lambda. Elle écoute les mêmes choses, grand public. Et si on fait un truc un peu différent, comme le public lambda, elle fait des yeux ronds et décrète que c'est "bizarre". Je reçois fréquemment des propositions de ces gens, qui me demandent de venir faire du reggae, du rock français, du pop rock et diverses choses qui, au fond, ne sont pas si éloignées que ça de variétés internationales et zique commerciale qu'on entend déjà partout, impossible d'y échapper. Et je réponds non, j'ai horreur de ça, on en est déjà saturés, moi ça me rend malade.



Pourquoi ? Mon meilleur ami, compositeur, me l'a dit très souvent : les musiciens ne comprennent pas les compositeurs. Pour eux, ce sont des gens qui ont des exigences qui leur échappent, qui se posent des questions qui leur paraissent inutiles. Qui cherchent à créer quelque chose de différent, alors qu'eux, pas du tout. Dans ma région, on ne te prend au sérieux que si tu débarques et en mets plein la vue, techniquement. Si par contre tu es compositeur, ça n'impressionne personne, ça ne fait aucun effet et ne déclenche aucun respect.

Perso, je suis hyper réceptif aux climats qui se dégagent d'une musique, à ses intentions. Quelle musique, pour dire quoi ? C'est cette hyper sensibilité qui m'a amené à me passionner pour ce domaine, puis à composer, quand je me suis rendu compte que j'avais pour ça quelques aptitudes. Moi je ne peux pas écouter une musique que je trouve vulgaire, ou remplie de clichés, un truc où je voie tout venir de très loin, où à aucun moment il n'y ait un petit détail qui me surprenne, un souci de recherche, un ton, un quelque chose qui relève de l'univers d'une personne, et non pas le truc impersonnel qu'on entend partout. Je ne peux pas écouter ces musiques standardisées, calibrées, formatées. Et encore moins les jouer, puisque pour jouer, je dois travailler énormément. Pas question de travailler un truc qui va me rendre fou, malade, va me casser le moral.

Donc, dans ma région, l'écrasante majorité c'est ça, le musicos qui fait du pop rock et ne se pose pas de questions, qui fait ça parce que "tout il est très beau, tout il est très joli", alors pourquoi pas ? Ou parce que c'est ça qui plait, c'est ça qui risque de marcher, et comme m'a dit un bassiste une fois : "moi je me complique pas la vie, je fais du pop rock, c'est facile, je connais les plans par coeur, ça plait, on gagne des ronds, basta".



La petite minorité, c'est jazz et classique. Là, c'est tout l'inverse. Là, les gens sont non seulement super exigeants en termes de contenu, musique de qualité, on place la barre très haut, etc. Mais aussi, en termes de technique. Si on n'est pas un cador, on se fait jeter, incendier, critiquer dans le dos, tant et plus.



Il semble bien que je ne fasse partie d'aucun des deux groupes. J'ai une approche intérieure trop différente des gens du premier, pour qui je suis un mec trop exigeant, qui se pose trop de questions, qui a des attentes en termes de contenu, de qualité musicale, d'idées. Et pour les autres, eh bien je n'ai pas le niveau, tout simplement !

Bref, je ne suis nulle part.

En plus, les jazzeux me détestent car je mélange les genres. Déjà, pour eux, j'utilise une basse fretless au lieu de la contrebasse, et un Rhodes à la place du piano acoustique. Hérésie, scandale ! J'ai déjà eu des accrocs avec eux et je suis passablement grillé, c'est clair.

Par ailleurs, je ne peux pas me taper des kilomètres : manque de ronds, santé pas terrible.

Quant à aller à Marseille, jamais de la vie : ça fait des années que je n'y suis plus allé. Déjà, avant, je m'y perdais. Mais surtout, chaque fois que j'y suis allé, j'ai assisté à des trucs assez glauques, en termes de violence, d'insécurité. Soit j'ai été victime, soit témoin. Ils sont cinglés, là-bas. Chaque fois, ça s'est mal passé, ou ça a été limite. Cela fait plus de vingt ans que je n'y suis plus allé, là je ne me sens plus du tout, terminé.

J'ai essayé, dans mon coin, de rassembler des gens pour faire des reprises fusion / acid jazz / funk. Reprendre du Uzeb, Incognito, Miles Davis, etc. Eh bien même pour ça, il n'y a personne. Soit les gens ont la trouille, disent qu'ils n'auront pas le niveau. Soit reculent, en se disant qu'on n'aura pas de succès, on ne passera nulle part, etc. Et c'est vrai, ça n'est guère "bankable". Pas à la mode.

Et, dans tous les cas, ici, les gens promettent monts et merveilles, mais ça n'est que de la gueule. Ensuite, ils ne tiennent pas parole. Ils ne sont pas fiables.

Ou encore, ils acceptent la proposition, se déclarent intéressés, mais ensuite, font tout pour que ça dérive. Cherchent à entraîner le groupe vers un répertoire plus variétés, ou plus jazz traditionnel. Commencent à dire qu'on devrait prendre une chanteuse, alors que très clairement j'ai proposé une musique instrumentale, dès le départ. Enfin, ils entrent dans une formation sans respecter le projet de départ, et en essayant de l'infléchir dans une autre direction.

Dans tous les cas, ne sont pas sérieux. Ne viennent pas ou de façon irrégulière. Quand ils viennent, n'ont pas travaillé le truc chez eux, etc.

Il y a aussi le cas du batteur qui tape comme un sourd, alors qu'il est amplifié, il faut le faire. Du guitariste qui débarque en disant qu'il a joué avec les plus grands, qu'il n'a plus rien à prouver, et qui est incapable de mettre un riff en place. Et ainsi de suite.

J'en connais plein qui me l'ont dit : "les groupes, j'en ai ma claque. C'est toujours la galère".

Sans parler du problème du local, qui est énorme. Quand on ne sait pas où aller...

Je connais deux ou trois personnes qui fassent autre chose. Avec des intentions nettement différentes, une vraie créativité. Mais qui sont dans des démarches où elles n'ont pas besoin de moi. Et ont fort à faire pour tenir le coup.

Telle est la situation.

Récemment, mon meilleur ami, compositeur, m'a dit que je devrais cesser d'essayer de rassembler du monde sur des reprises. Jouer mes propres morceaux, voilà tout. Sauf que je suis très loin d'avoir le niveau pour interpréteer mes propres parties de Fender Rhodes. J'avoue que je suis pris au dépourvu, face à cette idée. Je me sens seul. J'aurais besoin, je pense, de reprendre des cours. Je pense à une ou deux personnes, mais faudrait-il les joindre. Mieux : aurais-je les moyens de me réinscrire à la rentrée prochaine, dans une école de musique ? Pas sûr. Précarité, encore une fois.

Voilà, ça c'était une réponse musique. Désolé pour ceux qui ne se sentent pas concernés.

Gloubiboulgale 08 mai 2024 à 20:17  •   114214

Je ne sais que dire de plus. Je suis un exemple de ce que ça peut donner, quand l'insertion sociale foire, quand on ne trouve sa place nulle part, quand peu à peu on se retrouve dans des situations de plus en plus délicates, puis malsaines, puis franchement puantes. J'ai été harcelé sur mon lieu de travail pendant des années, une situation qui pourrissait sur pied. Après...

Le reste, non, je ne me sens pas de le raconter.

La seule chose qui me fasse tenir, c'est ce boulot quotidien de composition. Et ce projet d'album. Mais bon, ça fait plusieurs jours que ça n'est plus possible, pour des raisons techniques. Mes programmes ne marchent plus, faudrait que je voie mon meilleur ami, qui s'y connait, il est formateur dans ce domaine. Mais il est pris, des soucis en tous genres, et donc n'est pas disponible en ce moment. Et en attendant, je reste comme ça, en stand by.

Le projet qui me tient à coeur, c'est ça. Mon groupe virtuel. Mieux vaut faire une musique intéressante tout seul, que de jouer des trucs nazes avec d'autres. Je propose bien des choses stimulantes, mais il n'y a personne. J'ai un copain sax que ça branche, mais sax et claviers, si on n'a pas au moins une basse et des drums... Et on ne trouve pas. Les gens ne sont pas sérieux, ne veulent pas faire ça, ou ne sont pas assez disponibles, etc.

Plus le problème, insondable, du local.

Donc, en attendant, je trace. Je compose pour mon groupe. Je fais en sorte que ça joue, instrument par instrument, jusqu'à créer l'illusion d'un ensemble cohérent, avec des sons relativement réalistes. C'est ça, ou rien du tout, alors...



Je compose. J'écris. Je bidouille plus ou moins en arts plastiques. Tout ça dans mon coin. Mieux que rien.



Je reconnais qu'à lire, comme ça, ça fasse un peu... pitoyable.



C'est ça, l'isolement social, la solitude. C'est ça, être incompris.

ALBATORSle 08 mai 2024 à 22:15  •   114217

Gloubiboulga,

je n'ai envie de dire qu'une chose: Rrrhhhhhhh......... pffffhh................

Je ressens ta solitude.. je la vis également. Dans une moindre mesure parce qu'encore sous le même toi que mon fils et que celui de "ma" concubine. Mais au fond, nous sommes identiques. C'est comme s'il y avait en permanence une vitre qui nous sépare du reste de la population. Nous ne sommes fondamentalement pas constitués de la même essence. Et je suis en train, moi aussi, de prendre conscience que tout ceci semble inéluctable depuis ma recente prise de connaissance de ma condition, étant moi aussi HP I/E.

Pour autant, je n'echangerai ma sensibilité, ma perception des choses et ma vibration pour l'authentique et le beau, contre RIEN au monde. Ce "don" est clairement à double tranchant, mais les normo-pensants n'ont AUCUNE idée de tout ce qu'ils manquent, de tout ce que nous ressentons et comprenons alors même qu'il en sont parfaitement aveugles.
S'il était si facile de nous dissocier de notre dimension gregaire qui semble profondement ancré en nous dès notre naissance, ce site n'existerai probablement pas, ou en tout cas pas sous cette forme, et donc toutes ces souffrances que nous vivons ne seraient pas non plus. Et sur ce point, malheureusement, je crois qu'aucun psy, aucune drogue, ni aucune expérience ne peut vraiment nous debarrasser de ce besoin iné de partage et de résonance.

Le plus efficace à mes yeux en l'état serait de se faire une raison (je sais, c'est très difficile), mais surtout de comprendre que tu n'est pas seul à devoir subir ce monde de bourrins notoires, et que de fréquenter des sites comme celui-ci ou d'autres, et d'échanger avec des personnes tout aussi atypiques que toi, et qui vivent les mêmes tourments que toi, à la nuance de nos différences propres, peut t'apporter un vrai réconfort. De mon côté, ça m'aide beaucoup, depuis le peu de temps que fréquente APIE, je réalise, tout comme avec l'appui de ton temoignage, que nous ne sommes PAS SEULS malgrès tout!

Etant également musicien "exigeant" (guitare et chant), j'ai depuis un bon moment laissé tomber l'idée de m'éclater en communauté, ayant vécu a peu près les mêmes déceptions que toi à plusieures reprises, alors même que je considère que s'il y a bien une chose qui se partage, c'est bien la musique. Je me suis fait une raison.

La vie mérite d'être vecue, à chacun d'y trouver ce qui lui apporte le plus de petits bonheurs interieurs, qu'il est toujours possible de partager avec d'autres atypiques qui te comprendront...

Courage..............

Gloubiboulgale 08 mai 2024 à 22:58  •   114220

Merci. Oui, monde de bourrins. J'écrivais quelque part que je les enviais. Que, sans nul doute, ce monde avait été taillé par eux, pour eux. Et nous sommes autant de pièces rapportées, d'importuns, d'indésirables.

Je ne trouve hélas rien de plus à répondre ce soir. J'aimerais, mais j'ai la tête bien vide, on dirait.

Heureusement que je peux composer, c'est déjà ça. Ce que je fais est assez ambitieux, beaucoup, même. Mais pour le moment, je suis frustré, je ne peux pas continuer. Des problèmes de configuration. Mes instruments favoris, piano Rhodes, basse fretless, violon et autres, ne sont pas reconnus par ma machine. Il faut démêler ce sac de noeuds et je ne m'y connais pas assez.

Et puis, partager, avec certaines personnes, qui se reconnaissent plus ou moins dans ce que je dis. C'est vrai.



Merci. A suivre.

paradoxle 09 mai 2024 à 02:07  •   114227

@ALBATORS Bravo ! J'aurais pas mieux dit.

@Gloubiboulga Quand tu parles de ces milieux infames au début, je me permets de re-rétorquer qu'il existe d'autres façons de faire, des milieux musicaux qui ne sont pas dans la compétition mais le partage et la créativité. Ce que tu décris est ce que j'ai fui. Et j'ai pas arrêté de faire de la musique.

Gloubiboulgale 09 mai 2024 à 19:02  •   114251

Hello,

Je ne sais toujours pas comment m'adresser à une personne en particulier. Enfin, peu importe.

Oui, je me doute bien que tous les milieux ne fonctionnent pas ainsi. Il se trouve que dans mon secteur en tous cas, c'est de cette façon que ça se passe. Et j'y suis passablement grillé. Il y a des personnes pour qui je suis "un type qui a des idées", ceux qui réagissent au contenu de mes morceaux, qui, en fait, ont capté la dimension compositeur du personnage. Et d'autres pour qui je suis un "baltringue", qui ne prennent pas en compte mon côté compositeur et ne voient qu'une chose, mon manque d'assurance au point de vue technique. Je dirais qu'il y a globalement beaucoup de monde aussi pour qui je suis un "fada", quelqu'un qui ne tient guère compte des impératifs ambiants et réalités économiques, qui fait les choses à sa façon et donc se lance, en fait, dans des entreprises impossibles.

N'empêche.

Je veux dire que si je m'en étais tenu, d'entrée de jeu, qu'à ce qui marche, ce qui est "bankable", je n'aurais pas fait grand-chose. D'abord parce que ce qui marche me gonfle, le plus souvent. Il y en a déjà partout, quel intérêt de venir s'ajouter ? Ensuite, c'est justement en faisant autre chose que j'ai réussi, à une époque, par exemple, à publier des romans. A exposer des oeuvres d'art, même si ça ne s'est pas produit souvent. Et c'est grâce à ce travail personnel et singulier que je me retrouve à présent à la tête d'un projet d'album - il était temps.

Après, il m'est arrivé de proposer des choses à des gens qui refusaient. J'ai un ami d'enfance qui est très fort en dessin, il fait de la bande desssinée dans son coin, en amateur, n'a jamais publié. Je lui ai fait part de mon idée, d'adapter certains romans en BD. Bon, ça aurait représenté un boulot considérable. Au bout d'un moment, il m'a dit "oui mais si personne n'en veut, on aura fait un travail énorme pour rien". Oui, c'est le risque. Mais on aura fait quelque chose de bien, de passionnant. Moi je fonctionne ainsi. Lui n'a pas voulu se lancer. Moi je l'ai fait. C'est comme ça que je me retrouve, par exemple, avec un gros roman sur l'embrigadement de la jeunesse sous le Troisième Reich, dont aucun éditeur n'ait voulu jusqu'à présent, et qui m'a tout de même demandé huit ans de travail acharné. Effectivement, je l'ai un peu mauvaise. Je dois dire que lorsque je me suis lancé, je ne soupçonnait pas que ce texte allait soulever d'aussi patentes difficultés, ni demander autant d'acharnement.

Là, me sont venues des idées pour un roman de loufoque-fantasy, si on peut dire. J'ai à peine commencé. Hier, en discutant avec un copain qui tient une petite maison d'édition, il m'a dit "tu te lances encore dans un projet très pointu, avec peu de perspectives de débouché". Oui, on dirait bien. J'hésite à continuer. Car je sais maintenant qu'un roman peut entraîner vraiment très loin.

Quoi qu'il en soit, concernant la musique, je ne peux pas me vautrer dans les clichés, dans ce qu'on entend déjà partout, dès que trois clampins qui jouent se retrouvent. Ce pop-rock blues-rock, avec cette guitare qui tire sur ses cordes, ces inflexions caractéristiques que tout le monde utilise, sauf exceptions rares. Quand on se retrouve dans un endroit avec plusieurs boxes de répétition, et qu'on passe devant, on entend ce qui en sort et tout le monde ou presque fait la même chose. Moi je ne supporte plus.

Enfin, je ne voudrais pas que ce post finisse par n'intéresser que ceux qui se passionnent pour la musique ou ont une pratique dans ce domaine. Les autres perdraient quelque chose, je crois, dans la mesure où ce que je dis de la musique n'est qu'une illustration de mon propos général :

"Oui mais les brav'gens n'aiment pas que,

L'on suive une autre route qu'eux".



C'est de Brassens, que je n'aime pas du tout musicalement (j'ai horreur de son picking à la guitare), mais dont je trouve les textes d'une grande pertinence.



Oui, comme on m'a dit une fois, "il ne faut pas défier l'ordinaire". Or, en agissant différemment, on le défie, semble-t-il. Sans rien vouloir défier, en se contentant d'ETRE ce que l'on est, c'est suffisant. Apparemment, l'ordinaire se sent défié quand même. Qu'on se souvienne qu'on a brûlé beaucoup de gens comme sorciers et sorcières à une époque, simplement pour cette raison. Ils n'étaient pas tout à fait conformes, il n'en fallait pas plus.

Après, c'est vrai aussi qu'il y a des choses, peut-être qu'il vaudrait mieux les garder pour soi.

Je constate depuis longtemps, que dans de nombreux domaines, il vaut mieux ne pas dire ce qu'on pense. S'en tenir à une ligne floue, garder pour soi certaines pensées, rester dans un champ plus consensuel, plus politiquement correct. Ne pas critiquer certaines choses, car sinon on se fait exclure, descendre en flammes. Notamment dans le domaine de la musique. Quand je dis vraiment ce que je pense, c'est souvent mal reçu. Mais dans ce domaine, j'ai une perception bien particulière, celle de quelqu'un qui crée parce que justement, hyper réceptif à ce qui se dégage de la musique. Je crois que je vais prendre le parti de me taire. Faire ce que j'ai à faire, et ne pas me livrer à trop de commentaires.

Mais quoi qu'il en soit, je me suis souvent retrouvé à part, avant même d'avoir dit mon opinion, sur quoi que ce soit. C'était un phénomène... naturel. Qui passait, je crois, par le non-verbal. Quelque chose doit se dégager de mon attitude, qui m'échapperait totalement. Allez savoir. Je le dis, je le répète, on vit dans un système qui n'attend que le moindre prétexte pour rejeter. Il est basé sur ça, la concurrence, la loi du plus fort, le jeu à somme nulle. Quand on voit que dans certaines situations, on est d'entrée éliminé, à cause de ses fringues ! De ses fringues, oui. Moi ça me fait halluciner. Comme l'humain peut se montrer futile et inconsistant. Vous n'avez pas des fringues de marque, vous êtes donc un pauvre type, allez zou, direction la sortie.



Je pense aussi à autre chose : quelqu'un m'a dit récemment "celui qui rit trouve toujours d'autres personnes pour rire avec lui. Celui qui pleure se retrouve seul à pleurer". Je me dis que là encore, j'en ai peut-être trop dit sur moi, ici ? Il est possible que mon message fasse fuir. Que certaines personnes se disent : olà, il est compliqué, lui. Laissons-le dans son coin.

C'est le risque. Doit-on se retrouver à calculer ce qu'on dit, ce qu'on montre, ce qu'on est ? Porter un masque, faire preuve de tactique, de stratégie ?

Enfin, je réfléchis à tout ça. Je ne sais pas à quoi ça sert, mais je ne peux pas m'en empêcher.

Ma solitude est devenue dense. A couper au couteau.

Le silence aussi, ici.

Cela atteint une telle compacité... C'est très difficile à supporter.

paradoxle 09 mai 2024 à 20:28  •   114253

À propos de Brassens, j'ai posté ceci sur sa philosophie de l'anti-conformisme.
La philosophie de Brassens

Gloubiboulgale 12 mai 2024 à 12:35  •   114351

Merci...

Sale semaine. Vu personne ou quasiment. Silence radio presque total. Et je ne peux pas composer (problèmes techniques).

Dur. Vraiment du mal à tenir le coup.

ALBATORSle 12 mai 2024 à 12:54  •   114354

Problèmes techniques de quel ordre? Peut-être est-tu empêché pour "pas grand chose", que nous puissions délier rapidement? Résoudre des problème à distance n'est vraiment pas mon fort, mais ne sait-on jamais...

paradoxle 12 mai 2024 à 16:41  •   114367

Je me posais la même question. Tu composes avec quoi ? C'est quoi le problème ?

Gloubiboulgale 12 mai 2024 à 23:25  •   114388

Hello,

Merci de poser la question.

En fait, j'utilise Reaper, mais ma configuration Windows était devenue super instable. J'ai un ami qui m'aide pour la technique, on a tout réinstallé. Seulement, apparemment, Reaper ne retrouve pas tous ses instruments, il en a perdu en route. J'ai réussi peu à peu à rétablir la situation, toutefois il en manque toujours.

Je vois mon ami mardi, je pense qu'on va tout solutionner à ce moment-là, du moins je l'espère. Certains Vst ne sont pas détectés, passent inaperçus. D'autres ont changé d'aspect, j'espère qu'ils auront des réactions analogues, que je ne sois pas obligé de tout modifier, ce serait assez affreux, un énorme travail.

Période difficile, en ce moment, entre autres à cause de ça, mais pas que. Beaucoup de solitude, certains jours je ne vois personne. J'ai du mal à continuer à travailler la technique, je perds confiance en moi. Enfin, c'est compliqué. C'est le cumul de beaucoup de situations difficiles, ma vie en a été jalonnée. Actuellement, je me sens fragile, assez perdu.

Quelqu'un a dit, il me semble, qu'il avait écouté mes morceaux. Mais où ? Je ne me souviens pas en avoir parlé...

Des troubles du sommeil, aussi, ça non plus, ça n'aide pas.

Enfin, voilà. J'ai hâte de revoir mon ami, lui aussi c'est un atypique, un hypersensible, un créateur. C'est, dans mon environnement, la seule personne qui me comprenne, je crois.

J'ai l'impression qu'il y avait un grand potentiel en moi, mais qui a été grandement gâché par mon manque de confiance en moi. Et, pour une bonne part aussi, à ma difficulté à m'affirmer, et à me défendre. Je me suis laissé décourager ou refouler, dans certaines situations, là où d'autres auraient fait preuve de plus de persévérance. Et puis je suis beaucoup trop sensible.

En plus, je suis en musique un idéaliste, je suis très exigeant sur le contenu, les idées. Je déteste le remplissage, la démagogie, les gens qui jouent la montre en tirant tant et plus un morceau, en le faisant durer le double de ce qu'il devrait, etc. Je me sens mal à l'aise dans ma région où il n'y ait que la zique commerciale à bloc qui marche. Impossible de faire autre chose, on se heurte à des milliers de murs invisibles. Je ne vais pas non plus déménager, alors j'ai fini par ne plus rien proposer ni demander à personne : à la limite, il vaut mieux faire une musique intéressante et de qualité seul dans son coin, que de jouer avec d'autres des clichés et des trucs un millier de fois déjà répétés.

Je crois que j'ai perdu la foi. En moi, en beaucoup de choses. Ce serait compliqué à expliquer.

Notamment, je me demande quelle femme voudrait de moi, maintenant.

ALBATORSle 13 mai 2024 à 12:50  •   114408

Heyou,

ce que tu décris au sujet de Reaper, me fait vaguement penser soit à une corruption de données (qui pourrait prendre la forme de corruption sur le support de stockage comme d'origine plus "temps réel" comme un defaut de traitement par ta machine (surchauffe-virus-faux contacts internes-...-?). As-tu retranscrit tous les paramètres à l'identique dans Windows et Reaper depuis la réinstallation? N'y a-t-il pas eu de mise à jour non désirée depuis? En cas de gros doutes, réinstaller est à priori la première chose à faire pour lever le doute sur Windows et ses incessantes couches logicielles, ce que vous avez fait.

Diagnostique à l'emporte-pièce, je te l'accorde. Mais parfois, ce peut être un détail en passant lors de la manipulation de tout ce petit monde qui peut mettre sur la bonne piste, d'ou la difficulté à intervenir à distance. J'éspère que ton ami pourra t'aider concrêtement.
D'ailleurs, saches que tu as une chance que d'autres n'ont pas; celle d'avoir dans ton entourage une personne atypique cablée comme nous! Je l'aurais tellement apprécié... Sur ce plan, tu te trouves être moins seul que moi.. ;)

Pour ce qui est de la difficulté à dormir, je ne saurais que te conseiller d'essayer du CBD, qui pour ma part, m'aide vraiment.

Enfin, l'hyper-sensibilité fait parti du spectre à double-tranchant de notre condition; fantastique moyen d'hyper-perception émotionnelle d'un côté, fantastique moyen d'hyper-isolement de l'autre. Le beurre et l'argent.. :p

Et pour ce qui est des femmes, toujours délicat, mais pas impossible. Déjà, aller mieux me semble être un passage incontournable pour se donner les chances d'être plus en phase avec soi-même et avec l'image que tu renvois à l'autre. Même si tu rencontrais quelqu'un dessuite en allant mal, cela pourrait laisser supposer que cette même personne se porterai également plus ou moins mal (attrait pour l'identique), ce qui ne peut vraiment donner quelque chose de bon sur le long terme, tu ne crois pas?

Et pour terminer, je n'ai pas d'avis peremptoire sur quoi que ce soit, juste des réactions à mon stade de la compréhension des choses..

Force et courage à notre droit d'être, à toi, à nous tous..

Chattabattale 13 mai 2024 à 21:21  •   114423

Quand je perds la foi, que je ressens de la solitude dans ma différence, je m'invente une théorie acceptable pour moi ...

Elle n'est absolument pas fondée ...et donc je pense ... Pour mon bien être psychique ...à la théorie de l'évolution et à l'image qu'en fait Cronenberg dans "crimes du futur" sur le cancer comme théorie adaptive... Je me dis " ces différences neurologiques" ne sont pas un handicap, mais c'est une phase transitoire de l'évolution et j'imagine qu'il y a des dégâts collatéraux dans la phase de transition... Ok, je suis un cobaye pour l'univers ... Mais si l'univers choisit cette trame, c'est quelle est bonne, alors ok. Je fais partie de la trame et j'accepte.

Bon ça me soulage moi , je m'attends pas à ce que cela te soulage si ce n'est en te disant que si tu es un élément d'une phase transitoire de l'évolution humaine, ne te réfère pas aux autres ou n'en attend rien ...c'est juste inutile et contre productif ... Car la différence est là, le changement est là, et c'est bien normal qu'on ne puisse pas , sur une trame évolutive, se fier à la majorité.

Gloubiboulgale 18 mai 2024 à 23:25  •   114813

Hello,

J'ai été voir mon ami, finalement. Il m'a montré comment remplacer les Vst défaillants par les bons. Il faut faire ça piste par piste.

De retour chez moi, j'ai été confronté à des difficultés, ainsi que je m'y attendais. Mon violon qui ne réagit plus à la modulation, mon vibraphone qui ne fait plus que des sons très brefs, encore des problèmes qu'il va falloir résoudre en se creusant la tête tant et plus.

Voir mon meilleur ami m'a fait du bien. Mais de retour chez moi, ça a été à nouveau la solitude totale.

Pour répondre à tout le monde à la fois, voilà quel est mon sentiment :

Nous vivons dans un monde créé par des bourrins, pour des bourrins. Ce sont eux qui ont établi les règles. Nous formons un sous-groupe minoritaire, et ces règles n'ont pas été conçues pour nous. Elles nous mettent même dans des situations super inconfortables. Alors je peux certes me raconter des histoires, comme quoi je serais le produit transitoire d'une phase d'adaptation. En attendant, dans le quotidien, c'est contre les innombrables murs invisibles du système que je me cogne le nez, tous les jours. Et ce dans une solitude assez compacte.


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